Calling Marian : « Les soirées LGBT et féministes m’ont portée au devant de la scène »
Son EP ‘The Parade’ est disponible le 28 septembre sur JFX Lab
Calling Marian est une personne discrète et déterminée. Elle débute sa carrière en tant que DJ et s’impose très vite comme une figure importante de la scène électronique lyonnaise en devenant actrice des soirées queer et LGBT. Passionnée par les machines, elle sort un premier EP auto-produit en 2015 intitulé 199X avant de suivre son cœur, pour rejoindre la capitale. Là, elle se consacre à de nouveaux projets qui lui ouvrent de nouvelles perspectives artistiques. Parmi elles : un second EP produit par le label digital JFX Lab et un projet musical audiovisuel en binôme.
Sur sa terrasse semi-couverte, au 8e étage d’un immeuble du 11e arrondissement, Marianne s’assoit en tailleur sur un tapis berbère. Sa compagne, Cécilia, remplit sa tasse de café. Le soleil est au beau fixe et l’ambiance détendue. Entre quelques éclats de rire, Marianne raconte ses débuts dans la musique. Elle habite à Montpellier lorsqu’elle entame une license en musicologie. Elle y découvre un aspect méconnu de la musique électronique : l’époque contemporaine du XXe siècle, les débuts de l’électrification de la musique, les premiers enregistrements et les premières boucles. Loin des hits électro diffusés à la radio, la musique répétitive et concrète la passionne immédiatement. Malheureusement, son programme n’est pas assez focalisé sur cette période, et la musique médiévale ne pique pas l’intérêt de la jeune femme. Devenir prof d’histoire n’est pas envisageable pour elle, alors elle décide de quitter sa licence pour rejoindre ses amies à Lyon. Là-bas, elles organisent les soirées lesbiennes ‘La Chatte’ et très vite, on lui propose de mixer sur certains événements, en dépit du fait que Marianne n’ait jamais touché à des platines de sa vie.
« J’ai dû mettre 4 mois à préparer mon premier set sur Ableton. Mon but était de faire danser les gens alors j’ai sorti mes meilleurs tracks. Et ça a marché, à la suite de cette soirée je suis devenue résidente aux soirées ‘La Chatte’. »
Marianne se produit 7 fois pour les soirées de son amie. Mais cette période ne dure qu'un temps et Marianne s'écarte des soirées ‘La Chatte’. Sa carrière prend forme rapidement grâce aux nombreux contacts qu'elle a désormais dans l'industrie. La communauté LGBT lyonnaise est vaste, et les opportunités se multiplient, la jeune femme finit par jouer pour Garçon Sauvage, à l’origine du festival Intérieur Queer et même au Sucre. En parallèle de la scène, toujours scotchée à ses machines, Marianne décide de se mettre à la production. Elle achète un paquet de CD qu’elle grave de trois titres, un premier ‘EP’ entièrement auto-produit intitulé 199X, qu’elle distribue à ses proches.
Ce nouveau départ prometteur n’est pas que professionnel. Marianne rencontre Cécilia, sa compagne, lors des soirées LGBT lyonnaises. Après un certain temps ensemble, alors que l’artiste est bien installée sur la scène électronique locale et qu’elle est devenue une véritable icône techno et actrice LGBT, elles décident de déménager à Paris, où Cécilia travaille. C’est l’occasion pour Marianne de s’affirmer sur une plus grande scène et saisir les opportunités qui se présentent à elle. Mais c’est difficile. À Lyon, elle était une reine engagée avec un carnet d'adresse fourni. À Paris, elle connaît peu de monde.
« Parfois, j’ai l’impression qu’il y a moins de place pour moi ici. »
Maintenant qu’elle ne travaille plus, Marianne est déterminée à faire de la musique son métier. Dans la capitale, elle rencontre Cassie Raptor, vidéaste des soirées Wet For Me pour lesquelles Marianne s’est déjà produite à Lyon. Ensemble, elles forment le duo Solides, un projet audiovisuel qui vise à décloisonner l'interaction entre vidéaste et artiste. Solides, ce sont deux personnes sur scène qui jouent ensemble dans deux catégories différentes. Pendant que Marianne s'occupe de la partie audio, Cassie diffuse un VJing sur le même tempo. Avec ce projet, Marianne se renouvèle et renforce sa présence sur la scène parisienne : le brouillard se dégage. Malgré tout attachée à la communauté LGBT, la productrice techno veut désormais militer pour la musique, non plus pour ce qu’elle est.
« C’est un peu par hasard que j’ai commencé à jouer. C’était pour des soirées lesbiennes et cette communauté m’a amenée à la musique et portée au devant de scène. Mais aujourd’hui, j’aimerais m’affirmer en tant qu’artiste techno plus qu’en tant que DJ pour des soirées LGBT. »
Ce n’est plus la scène qui fait vibrer Marianne. Ce qu’elle veut, c’est produire. Et dans son élan créatif, elle est contactée par le label JFX Lab : ils ont suivi sa progression fulgurante depuis Lyon, ils veulent couvrir une de ses sorties. Marianne boucle un second EP en quelques mois seulement : ‘The Parade’, un maxi numérique de 4 titres, inspiré de l’esthétisme des parades coréennes.
« Pour la petite anecdote, j’étais en train de matter une vidéo de parade coréenne, et j’ai remarqué que leurs pas s’accordaient parfaitement au tempo de mes tracks. J’ai littéralement été fascinée par le paroxysme entre l’esthétisme audiovisuelle et la réalité politique : là-bas, la techno n’est pas diffusée. »
Un EP initialement conçu pour le club et pour le mouvement des corps qui cache une réalité plus complexe : Marianne a mis beaucoup d’elle dans ce chapitre. De fait, la productrice s’est trouvée. Il y a quelques années, elle quittait Montpellier sans perspective. Aujourd'hui, c'est une jeune parisienne épanouie et confortée dans l’idée de vouloir vivre de la musique. Et ses ambitions sont multiples.
Bien sûr, elle souhaite sortir son premier album, et la production d'un prochain EP est imminente. Avec Cassie, elle compte bien dynamiser son projet Solides et l'exporter en province. Et puis, Marianne n'oublie pas la cause LGBT et le militantisme. Pour qu’un jour, la fête n'ai plus de barrière et que les communautés n'en soient plus qu'une, décloisonnée.
L'EP de Calling Marian 'The Parade' est disponible dès le 28 octobre au format numérique sur le label JFX Lab. Découvrez le track '0019.1' issu de l'EP ci-dessous.
Crédits Photo : Marie Rouge
Camille est rédactrice freelance à Mixmag France. Suivez-la sur Twitter.