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Reportage

Les perles du Dour, 30e édition

5 belles surprises au line-up

  • Camille-Léonor Darthout, Marie Dapoigny | Photo en une : © Coleen
  • 24 July 2018

Près de la frontière française se tient depuis 1989 le plus grand festival de Belgique et la coqueluche des festivals européens : Dour. Une immense production qui célébrait cette année sa 30e édition avec 7 scènes, 229 artistes, 228 000 tickets vendus, des stands, activités et installations à perte de vue — une organisation irréprochable pour un événement d’une telle ampleur. Retour sur cinq artistes qui nous ont mis des étoiles plein les yeux.

Sur un site complètement repensé et marqué par la présence des éoliennes, Dour a su comme à son habitude aligner une sélection remarquable de têtes d’affiches, tous genres confondus : house, techno, drum’n’bass, hip-hop, rap et rock. Un havre de la fête qui prend place sur 5 jours de l’après-midi jusqu’à tard dans la nuit, sur un site réaménagé pour l’occasion : une fête en continu, des premiers concerts aux afters au camping.

Le festival pèche presque par le nombre de performances et une timetable si dense que la sélection inéluctable laisse parfois un goût amer, celui du sacrifice et du compromis. Nos preux chevaliers de la fête ont tant bien que mal tenté d’assister aux plus grand nombre de concerts dès le jeudi soir, voici une sélection des performances les plus marquantes. Une évaluation basée sur l’ambiance, la diversité et l’originalité des shows et le niveau de transpiration : quand on ressort les cheveux collés aux tempes, on estime que le set a été assez efficace pour en parler. Voici les 5 pépites musicales de Dour festival selon Mixmag.

Photo : The Chemical Brothers à Dour 2018, © Vanessa Coquelle

1
The Chemical Brothers

La nuit tombe quand les Chem Bros débarquent sur la mainstage de Dour - la Last Arena. Tom Rowlands et Ed Simons débutent leur live audiovisuel sur écran géant, visuels sci-fi incarnés par des hologrammes de robots qui semblent s’élancer sur la foule avant de se dématérialiser dans un chaos d’images psychédéliques.

La scénographie noire et blanche est impressionnante, et attire tout de suite une foule conséquente. Mais les deux vétérans - qui préfèrent le big beat dont ils sont pionniers en début du show - n’ont pas encore tout à fait conquis. Après tout, ce qui a fait le succès des pionniers de la scène rave anglaise dans les années 90, ce sont leurs tracks acid : ceux qu’ils jouaient alors encore connu sous le nom de The Dust Brothers au tout début des années 90.

Alors qu’on s’apprêtait à rebrousser chemin, un peu las des titres populaires qui ont fait le succès du duo sur les albums Exit Planet Dust, Dig Your Own Hole ou encore Surrender, de nouvelles sonorités viennent chambouler nos plans – et notre jugement. Le dancefloor est soudain transformé en rave party géante. Le cadre n’a ni âge, ni date. C’est comme si d’un seul coup, le temps n’existait plus et que 2018 pourrait tout autant être 1993. Les Chem Bro se sont enfin décidés à nous replonger presque trente ans en arrière dans les clubs suintants de Manchester. L’attente était méritée, et les jambes enfin en plein effort.

Le mot du public :

« Les Chem Bros, c’était quand même mieux avant »

Photo : © Reuters, Nils Frahm à The Roundhouse, Londres, le 25 mai 2015.

2
Nils Frahm

Si sa musique ne passe pas aux heures de grande écoute sur Virgin Radio, le prodige berlinois Nils Frahm n'en joue pas moins constamment à guichet fermé devant un public de fans inconditionnels et c’était un plaisir d’avoir enfin l’occasion de le voir évoluer sur scène, avec une scéno simple et intimiste qui n’est pas sans rappeler le nouveau studio qu’il a construit pour son dernier album, All Melody.

Le résultat est à mi-chemin entre Aphex Twin et Chopin. Quelques ampoules à filament mettent en valeur ses machines analogiques vintage, dont un Buchla, un piano droit et un piano à queue. Entre ces différents instruments il évolue constamment, véritable homme-orchestre distillant ses compositions néo-classiques délicieusement progressives et minimalistes qui sauront immédiatement séduire les amoureux d'Erik Satie.

Quand le beat de la dance music fait enfin son apparition sur le puissant ‘Sunson’ pour accompagner ses mélodies d’un autre monde, le public entre en transe, la foule frissonne de plaisir entre deux interludes de sonorités cristallines. Une performance jouissive, à l’avant-garde de la musique contemporaine : de la dance music berlinoise passée au filtre mélancolique d’un pianiste de génie.

Le mot du public :

“Je connaissais pas, mais il m’a bien scotché.”​

Photo : Dour 2018, © Vanessa Coquelle

3
Ben UFO

Quand le magicien de la bass music Ben UFO reprend les platines derrière une heure et demie de magie house et disco signée Daphni, le public ne sait pas trop à quoi s’attendre. Mais Ben Thompson n’est pas considéré comme un des DJs londoniens les plus talentueux de sa génération pour rien : d’une main de maître, il s’empare de l’atmosphère et hypnotise la salle avec une série de titres stratosphériques à l’exemple du remix de Chmmr - ‘User’ par CLI, avant de s’adonner, deux heures durant, à un tour d’horizon d’une myriade d’influences bass, electro et garage, de la fantaisie breakbeat-gospel à 120 bpm d’Andrés - ‘The Essence’ aux paillettes 80’s de Clio - ‘Eyes’.

Dans le set du co-fondateur de Hessle Audio se mêlent avec élégance et une technique parfaite les beats deep avec les plus acides, les blips de la 303 avec les pads mélodiques – un sans faute, qui se termine à 4h du matin en un feu d’artifice breakbeat à 150 BPM. Un tour de force du selector de Rinse FM, et un des set les plus variés et maîtrisés du festival - la marque de fabrique d’un DJ exceptionnel.

Le mot du public :

« After au camping ? »​

4
Daphni

Photo : Daphni à Snowbombing, 2014.

La Petite Maison dans la Prairie est une tente intimiste à deux pas de la Last Arena. Encadré d’un solo live mécanique de Floating Point et un DJ set fracassant de Ben UFO, Daphni - lead man de Caribou - a déjà commencé à chauffer la foule à notre arrivée.

Un DJ set d’une qualité de sélection impressionnante entre vocales disco, sonorités organiques et des grooves house irrésistibles. À la fois sombre et solaire, dansant et hypnotique, Dan Snaith laisse à voir un univers pointu, renversant et mixé sans accrocs ; le même savoir-faire qu’on a vu à l’œuvre dans son excellent FabricLive CD - ainsi qu’au closing du Sònar l’an passé. Un vrai intellectuel de la sélection musicale - calculateur et calibreur qui porte son nouvel album Joli Mai sorti en octobre 2017 avec éclat.

Le mot du public :

« Je pensais que Daphni, c’était une meuf qui faisait de la techno »

5
Preditah

Une belle promesse de Dour cette année : représenter la scène anglaise avec des têtes d’affiches drum’n’bass, jungle et UK garage. La bass music est un mouvement souvent délaissé en France au profit de la house et de la techno. Il est rare de trouver une programmation aussi pointue sur des festivals éclectiques et d’une telle ampleur - hors des contrées anglaises, preuve de l’ouverture d’esprit de la scène belge.

Pourtant, devant Preditah, la foule francophone se prête volontier à l’interprétation des titres de Skepta et JME que le producteur balance à coup de gros rewind. Sa collaboration avec Jorja Smith sur le morceau ‘On my Mind’ fait fureur, bras en l’air, les cordes vocales en pâtissent. Le parquet du Labo tremble, il fait très chaud. Un mec traverse le dancefloor avec un ananas, tenu en laisse. (?!)

Impossible de s’arrêter de danser, Preditah ne laisse aucun répit à son public et chaque morceau provoque une cohue sur le dancefloor. Les premières notes du titre ‘POW!’ de Lethal Bizzle retentissent mais aucun pogo, à notre plus grand étonnement. Qu’importe, la foule est pleinement réceptive à la performance qui sentirait certainement le « déjà vu » sur le territoire anglais, mais pas encore ici, où le grime et la UK Garage ont encore beaucoup à dévoiler. Les cheveux sont collés à la nuque, le set d’une heure et demi de Preditah est diablement efficace. L’Anglais a prodigieusement clôturé notre première soirée et conquis nos pieds - endoloris.

Le mot du public :

"Pull uuuuuuuuuuuuuuuup !!!!!!"

Voilà une sélection non-exhaustive ; du fait d’une programmation très dense et des performances qui - la plupart du temps - se chevauchaient sur le line-up, on repart sans avoir pu assister à tous les shows. Cependant, quelques mentions spéciales sont de rigueur.

Pour Mefjus d'abord qui, dès notre arrivée sur le site jeudi soir, nous a pris dans un tourbillon drum’n’bass hyper dansant. Son nouvel album Manifest est sorti en avril dernier sur Vision Recordings, et a définitivement conquis nos pieds sur l’impressionnante scène de Red Bull Elektropedia en compagnie du MC Maksim.

Dans un tout autre registre, Fatima Yamaha a totalement scotché son public, prouvant que la musique électronique pouvait se chanter au passage de son track ‘What’s a girl to do’. Une ambiance festive, des bras en l’air devant une foule surexcitée.

Fidèle à lui-même, Folamour a délivré une performance implacablement dansante, disco et festive, balancée entre des pépites connues, méconnues et ses productions, à l’instar de son dernier EP Club Degli Esploratori, efficace aussi bien dans un casque en allant au travail, à l’apéritif ou tard le soir - pour s’emparer du dancefloor. Égosillement notable du public sur son remix de France Gall ‘Ella, elle l’a’.

Photo : Dour 2018, © Vanessa Coquelle

Et puis que serait la programmation de Dour sans sa part plus que respectable d’artistes rap et hip-hop ? Le crew belge l’Or du Commun jouait presque à domicile sur la main stage. Fidèles à eux-mêmes, les trois rappeurs ont délivré une performance engageante entre leurs titres phares comme ‘Apollo’, des titres plus engagés comme ‘Prison Vide’ un premier extrait de leur album Sapiens prévu pour l’automne 2018 et les morceaux en solo de Swing, qui se produisait le lendemain sur la Boombox.

Hugo TSR, petit prince du 18e arrondissement de Paris, a embarqué le public dans son rap tantôt conscient tantôt tranchant, des mélodies nostalgiques, signature de l’école des buttes Montmartre. A capella, la grosse tête du TSR Crew a démontré un flow implacable.

Pour une session Fifty-Fifty à ciel ouvert au Rocamadour, Le Motel - producteur de Roméo Elvis sur l’album Morale2Luxe - a présenté un projet solo qui mérite une attention toute particulière. Évidemment influencé par la scène hip-hop, le beatmaker de 24 ans manie chants africains et samples de marimba sur la production de son EP OKA paru en 2015, soit bien avant la sortie de son album en collaboration avec Roméo. Les deux artistes ont annoncés reprendre leurs carrières solo pour la suite, ce qui devrait annoncer une sortie prochaine pour Le Motel.

De quoi être certain de revenir l’année prochaine.

Le mot de la fin : DOUREUUUUUUH !

Photo : © Laurence Guenoun, Dour 2018

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