R. Kelly encourt 70 ans de prison pour abus sexuels sur mineures
Quatre victimes sont sorties de l’ombre pour des crimes commis entre 1998 et 2010
Ses démentis sont restés sans effet. L’artiste r’n’b R. Kelly est incarcéré depuis 3 jours à Chicago, sa ville natale. Son avocat a annoncé sa libération probable sous caution aujourd’hui ou demain. Le chanteur devra remettre son passeport, s’engager à ne pas approcher de femmes de moins de 18 ans et verser 100 000 dollars (88 135 euros), soit 10% du montant de sa caution, fixée à 1 million de dollars. 250 000 par cas d’abus de mineure présumé. Mais il reste optimiste.
La date du procès n’est pas encore confirmée. Confiant sur l’issue de ces accusations, le chanteur de 52 ans a programmé une tournée européenne au printemps 2019. Ses avocats l’ont promis : la bataille sera féroce pour démontrer l’innocence de Robert Sylvester Kelly. Les accusations ne sont pas nouvelles ; il est soupçonné depuis 3 décennies d’entretenir des relations sexuelles avec des jeunes femmes mineures, âgées de 13 à 17 ans.
Il y a onze ans, R. Kelly avait échappé à une condamnation, lorsqu’une vidéo montrant ses ébats avec une jeune fille de 14 ans a fait surface. Faute du témoignage ou d’une plainte de la victime ou de ses parents, ses avocats avaient obtenu gain de cause. Mais en 2019, après le passage de la déferlante #metoo, les choses se profilent différemment pour lui : quatre femmes ont accepté de témoigner contre lui. La procureure d’État Kim Foxx a confirmé que la justice dispose d’une vidéo montrant le chanteur en plein ébats sexuels avec une mineure, qui confirme devant la caméra qu’elle a alors 14 ans. Deux autres femmes l’accusent d’abus sexuels alors qu’elles étaient mineures et sous l’influence de drogue et d’alcool après un concert à Baltimore en 1995. D’autres témoignages pourraient émerger pendant le procès.
R. Kelly est convoqué devant le juge le 8 mars prochain – une date qui coïncide avec la journée des droits des femmes – pour faire face à dix chefs d’accusation. Chacun d’eux pourrait lui valoir des peines de prison de 3 à 7 ans. Soit une peine maximale de 70 ans derrière les barreaux, dans un pays où les peines sont cumulables.
À la suite de la parution du documentaire brûlant Surviving R. Kelly, il semblerait que l’auteur du tube ‘I Believe I Can Fly’, protégé des années durant par sa popularité, devra bientôt faire face à ses actes. Ses victimes, majoritairement issues des quartiers populaires noirs de Chicago, sont souvent restées dans l’ombre par peur d’être décrédibilisées. Mais dans une Amérique post-Bill Cosby, où les crimes pédophiles sont au cœur du débat avec les scandales qui touchent l’Église, les consciences s’éveillent et la parole des femmes trouve une légitimité nouvelle.
À 27 ans, l’interprète de ‘You Are Not Alone’ avait épousé Aaliyah, alors âgée de 15 ans. Un mariage annulé un an plus tard par la famille de la chanteuse. Le film Surviving R. Kelly dresse un portrait saisissant des « abus sexuels, mentaux et physiques » perpétrés sur les jeunes femmes. Ces révélations ont motivé le lancement de la campagne #muterkelly, largement appuyée par les femmes de l’industrie musicale. Spotify a alors retiré ses titres de son catalogue. Sous la pression du public, RCA (Sony Music) a également mis fin à son contrat.
À l’issue de l’audience du samedi 23 février, son avocat Steve Greenberg a déclaré que « R. Kelly n’a sexuellement agressé personne. C’est une rock star, il n’a pas besoin d’avoir des relations non consensuelles ». Selon lui, les accusatrices de R. Kelly « mentent ».
@MarieDapoigny – Avec AFP