« Saboter le set du DJ suivant n'est jamais une bonne idée » | The Secret DJ
Souvenez-vous, il s'agit avant tout des personnes sur le dancefloor
"Est-ce qu’il est acceptable de saboter le DJ set suivant si le mec est une véritable tête de gland ? De belles anecdotes de sabotage à raconter ?" Michael, Aberdeen
Soyons clair : il n’est jamais acceptable de faire ce genre de chose. Parce que tout ne dépend pas de vous - ou de ceux qui passeront après - mais du dancefloor. Et tout le monde devrait faire le maximum pour le dancefloor. Si tu gâches la soirée, tu gâches la soirée de tout le monde. Sauf si tout le monde dans la salle a fourni la preuve écrite que le DJ est un gland et qu’il est objectivement fait état qu’il embarrasse la totalité de l’assemblée. Sinon, considère que c’est un très grand NON.
Et bien sûr, même si ce cas là se présentait, il serait bien loin d’arrêter le DJ en question. Parce qu’il est évident que le problème numéro 1 avec tous les DJs, c’est l’égo. Certains artistes ont la sincère illusion que la nuit leur appartient et que gâcher la soirée de chaque personne présente dans la salle n’est absolument rien comparé à leur monstrueux égo.
La forme de sabotage la plus tristement courante reste le contrat des gros noms, qui obligent les clubs à refuser tout autre DJ avant que la "star" ait joué. Nous l'avons tous vu. C'est complètement pathétique. Il y a aussi le fameux « Johnny Laptop » qui insiste pour que tout s'arrête pendant qu'il·elle installe son matos, chose qui aurait dû être faite avant que les portes du clubs ne s'ouvrent. Si vous pensez qu'essayer de grimper par dessus un DJ en train de jouer pour débrancher la piste qui tourne n'est pas du sabotage, c’est que cela ne vous est pas arrivé assez souvent.
Il y a également des exemples plus ésotérique. Comme le résident du Space qui s’empressait d’aller se plaindre au du directeur du club dès qu’il entendait un morceau qui ne lui plaisait pas. Ou le même cul terreux qui reste à côté d’un DJ invité à jouer très tôt le matin, qui baille dramatiquement en lisant un tabloide en mangeant un sandwich à l'œuf comme un instructeur de conduite rabat-joie.
Il y a beaucoup de sabotage qui réside simplement dans l’ignorance, l’inexpérience et la stupidité. Comme les promoteurs qui se précipitent en plein milieu du set pour vous faire arrêter de jouer cet a capella autrefois considéré comme une pure beauté à l’époque de l’acid house - mais ils pensent qu'il s'agit d'un remix house de l'artiste en question. Oui oui, viré des platines pour avoir joué un a capella sur un beat, chose que l’on appelle généralement « DJing ».
Ces jours-ci, la technologie joue un rôle important. J’ai déjà vu des DJs expérimentés qui confient sournoisement leur ordinateurs et leur configuration de synchronisation en sachant délibérément que les DJs suivant jouent sur un format différent, mais ils laissent tout de même leurs câbles et leurs réglages. À moins d’une minute de partir. Ils laissent ainsi la foule faire face au silence qui s'en suit inévitablement - en huant.
J’ai déjà vu une DJ très connue jouer un set remarquable au cours duquel un zombie ambulant a littéralement trébuché sur le câble d’alimentation électrique principal - coupant ainsi le courant de tout l’événement. Un peu plus tard dans ces zones hideuses et toxiques que sont les « commentaires », des mercenaires du clavier ont jugé bon de s’insurger contre les femmes, qui devraient selon eux ne pas être autorisées à jouer des sets qu'ils rêvent secrètement de pouvoir jouer, afin d’éviter que leur "vagin" ne casse tout. Expliquer les circonstances réelles n’aurait aucun impact sur leur petit esprit étriqué et jaloux.
Mais il faut cependant réussir à faire la part des choses entre des actes de haine délibérés et un mauvais show. Certaines mauvaises performances peuvent ressembler à du sabotage avec un peu de paranoïa. J’ai récemment vécu une nuit déroutante dans un établissement des Baléares. C’était tellement désastreux que j’ai sincèrement cru qu’une main perverse passait derrière moi. J’ai aussi joué à la seconde édition de la Love Parade anglaise à Newcastle il y a plusieurs années, ai parcouru 1 000 kilomètres pour jouer devant une salle vide. Pendant la dernière heure de mon set, la salle a commencé à se remplir et 20 minutes avant de terminer, la foule était en train de sauter partout. Alors que mon dernier track était en train de tourner devant une foule de million de personnes que j’avais captivé progressivement, ils ont annoncé le DJ suivant. Ce n’était pas du sabotage. Juste un set qui ne s’est pas bien passé.
Comme lors de cette soirée sud-américaine sponsorisée par Durex, où il y avait peut-être 400 personnes dans un espace de 20 000 personnes - qui étaient visiblement issus de gangs locaux et rivaux. J’ai relevé les yeux de mes platines pour apercevoir des gestes en direction des oreilles puis des mouvements près de la gorge : la définition universelle de « cette musique mérite qu’on te tue ». Pendant ce temps, des danseurs se dandinaient sur scène habillés en foutre sponsorisé – à taille humaine. Encore un mauvais show.
Le sabotage technique et l'attaque personnelle sont les deux faces d’une seule et même pièce. Bien que les actes de pure haine soit assez rare dans la vie courante, toutes ces heures passées en ligne ou sur les téléphones à critiquer, mentir et attaquer sont devenues si banales que cela peut aussi bien être interprété de la même sorte dans le business. J'ai tout entendu, j'ai été traité de tous les noms et accusé de tant de choses qui m'ont amené à me demander comment quelqu'un peut en arriver là.
C'est le véritable problème auquel nous devons faire face à l'ère de la post-vérité. Je trouve que tant que vous ne vous en êtes pas rendu compte par vous-même, il est préférable de cultiver un certain scepticisme – sain – au sujet de tout ce qu'on puisse vous dire dans cette industrie. Mais ne désespérez pas: si vous n'avez pas d'ennemis et de personnes qui vous détestent, cela signifie que vous n’êtes pas suffisamment bon, de toute façon.